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dimanche 26 septembre 2010

Le regard d'un géographe sur l'Europe

Le géographe et diplomate Michel Foucher, notamment auteur de l'incontournable Fronts et frontières. Un tour du monde géopolitique (Fayard, 1ère édition 1988), et plus récemment de L'obsession des frontières (Perrin, 2007), était l'invité de l'émission "Les matins" sur France culture du 29 décembre 2009.

Dans cette émission, il revient sur la question de l'Union européenne, du traité de Lisbonne, sur l'identité européenne, sur "l'européanisation" comme projet politique, sur la perception de l'Europe par les pays extérieurs, sur l'indéfinition territoriale comme défi permanent... On remarquera notamment le cas particulier du Kosovo et la situation des Balkans comme enjeu dans la quête identitaire de l'Europe (ouverture de l'UE vers l'Europe du Sud-Est, problèmes de visas en Bosnie-Herzégovine qui relèvent de problèmes institutionnels et de l'impossible processus décisionnel dans la construction étatique issue des accords de Dayton...).



 
Présentation de l'émission :
"A partir du 1er janvier l'Europe va offrir un nouveau visage au reste du monde avec l'entrée en fonction du couple Herman Van Rompuy / Catherine Ashton, respectivement président permanent du Conseil européen et Haute représentante pour les affaires extérieures. Il s'agit d'une avancée institutionnelle incontestable. Néanmoins il reste des questions de fond sur l'Europe aujourd'hui et sa place dans le monde... Questions que nous aborderons avec notre invité, Michel Foucher, géographe et diplomate. Avec l'entrée en vigueur du Traité de Lisbonne, l'Europe est-elle sortie de l'ornière ? L'Europe pourquoi faire : quelle place dans le jeu géopolitique mondial ? Que reste-t-il aujourd'hui de l'idée de convergence européenne à l'heure où la crise révèle des différences majeures dans les situations économiques des 27 ? Bilan ce matin de l'année 2009 pour l'Europe et perspectives pour 2010..."

Source de l'info :
Le site de l'émission "Les Matins".



mercredi 22 septembre 2010

Conférence "Question de géographie politique : un dialogue franco-brésilien"


L'université Jean Moulin Lyon 3 et l'UMR 5600 "Environnement Ville et Société" organisent une table-ronde sur le thème : "Questions de géographie politique : un dialogue franco-brésilien", le vendredi 24 septembre 2010, à partir de 14h à l'amphithéâtre Huvelin de l'université Jean Moulin Lyon 3 (15 quai Claude Bernard, 7ème arrondissement, Lyon)


Programme de la table-ronde :

Stéphane Rosière (université de Reims Champagne-Ardenne)
"Géopolitique du système-monde, réflexions sur la violence systémique à l'échelle globale"

Emmanuelle Boulineau (École normale supérieure de Lyon)
"Géographie politique de la construction de l'Union européenne, enjeux pour l'Europe centrale et orientale"

Ina Elias de Castro (université Fédérale de Rio de Janeiro)
"Les bases territoriales de la démocratie au Brésil et les problèmes de la représentation proportionnelle"

Michel Bussi (université de Rouen)
"Egalité géographique et démographique et maillage politico-électoral"

Pernette Grandjean (université de Reims Champagne-Ardenne)
"Habiter, une question géopolitique"

Delphine Papin (Journal Le Monde et les Cafés Géopolitiques)
"Les cafés géopolitiques, la géopolitique et le débat citoyen"

Bernard Bret (université Jean Moulin Lyon 3)
"Géoéthique et géographie politique"


Conférence "Le rôle de la diaspora haïtienne dans la reconstruction du pays"


Le Centre d'études et de recherches internationales de Sciences Po Paris (CERI) organise une conférence-débat intitulée "Haïtiens du dedans, Haïtiens du dehors. Le rôle de la diaspora haïtienne dans la reconstruction du pays" le mercredi 29 septembre 2010 de 16h00 à 19h00 à Paris (salle de conférences de Sciences Po, 56 rue Jacob, 6ème arrondissement) avec pour intervenantes Stéphanie Melyon-Reinette (Université Antilles-Guyane), Maud Laethier (IRD), Anne Lescot (Réseau Culture Haïti) et Audrey Célestine (Sciences Po-CERI).


Annonce par les organisateurs :
"Le 12 janvier 2010, Haïti a été au centre de l'intérêt international suite à un tremblement de terre meurtrier. Pour des millions de personnes à travers le monde, Haïti était un centre d'intérêt à plusieurs égards et depuis plusieurs décennies. Un symbole de liberté pour ses voisins caribéens après la proclamation de l'indépendance de l'île en 1804, un symbole de création artistique, littéraire, culturelle pour les amoureux des arts et des belles lettres, un lieu vers lequel les yeux et les coeurs de toute une diaspora haïtienne, de sang et d'adoption, se tournent perpétuellement. A l'heure de la reconstruction, du projet global à repenser et mettre en oeuvre pour Haïti, lil s'agit de revenir sur les liens qui unissent les "Haïtiens du dedans" et les "Haïtiens du dehors". Comment envisager les relations entre ceux qui sont restés et ceux qui sont partis ? La diaspora haïtienne est-elle de nature spécifique ? Dans quelle mesure la dichotomie entre ceux du dedans et ceux du dehors fait-elle sens pour les principaux concernés ? Quelle relation établir au-delà des actions de solidarité dans l'urgence ?"


A lire sur Haïti,la catastrophe et la reconstruction :

Source de l'information :


"Dead Cities" (Mike Davis)


Mike Davis, 2009, Dead Cities, Les Presses Ordinaires, collection Penser/Croiser, Paris, 140 p. (1ère édition en anglais, 2002, The New Press).

Si Yves Lacoste a écrit le célèbre La géographie, ça sert, d’abord, à faire la guerre, Mike Davis aurait pu intituler cet ouvrage « La géographie urbaine, ça sert, aussi, à détruire les villes ». Dans cet essai, Mike Davis, incontournable spécialiste de géographie et de sociologie urbaines, entraîne ainsi le lecteur dans l’histoire urbaine (mal connue) de la destruction des villes. Immédiatement, le sujet fait penser à Stalingrad ou Bagdad, mais l’auteur nous propose ici d’analyser des « villes mortes » moins célèbres pour certaines, et surtout d’étudier les phases préalables de la destruction des villes, ainsi que l’utilisation de l’urbanisme et de la géographie urbaine comme outil de destruction orchestrée pour commettre des dégâts matériels et psychologiques profonds. Parce qu’il existe des villes créées seulement dans le but de les détruire.




mardi 21 septembre 2010

Les ponts de Mitrovica : l'Ibar, une rivière-frontière ?


Autre question qui m'a été posée récemment concernant la ville de Mitrovica : l'existence d'autres ponts que celui appelé "LE" pont par les médias. Si l'attention médiatique s'est focalisée sur un seul pont, celui qui relie les centres-villes albanais au Sud et serbe au Nord de la rivière Ibar (voir le billet "Le centre de Mitrovica"), cela ne signifie pas qu'il n'existe pas d'autres infrastructures qui permettent de relier les deux rives. On avait tenté de montrer dans le billet "Des ponts entre les hommes" que le pont-infrastructure n'était pas suffisant à produire des échanges entre les populations habitant sur deux rives, surtout lorsqu'il existe, comme à Mitrovica (mais également à Mostar), une forte communautarisation des espaces de vie. Petite "balade" sur les ponts et les passerelles de la rivière Ibar dans la ville Mitrovica.




"Le" pont de Mitrovica : un pont-symbole,
centralité dans la ville et lieu-discours dans les violences

Principalement point d'accès entre les deux rives de l'Ibar, ce pont (nommé pont Austerlitz sur les cartes baptême terrain de la KFOR*) relie les deux centres de la ville de Mitrovica : au Nord, on retrouve le centre-ville qui structure les spatialités des Serbes de Mitrovica, où les commerces utilisent encore le dinar (la monnaie officielle de la Serbie) et où les panneaux et publicités apparaissent en alphabet cyrillique. Au Sud, on retrouve le centre-ville albanais, qui se structure notamment autour du marché à ciel ouvert. Ce pont fait l'objet de toutes les attentions médiatiques, parce qu'il est devenu le géosymbole de la division de la ville en deux quartiers-territoires qui se font face. C'est pourquoi, le pont Ouest prend une grande importance symbolique dans les violences intercommunautaires : traverser le pont est à la fois un signe de provocation vis-à-vis de l'autre communauté, et un symbole de volonté de se réapproprier l'ensemble de la ville (signifiant ainsi le rejet de "l'Autre" qui marque encore la société dans un Kosovo en quête d'une identité culturelle et politique). Voir le billet "Le pont de Mitrovica : violences et médiatisations au Kosovo". Dans son recensement des violences intercommunautaires entre juin 1999 et mars 2004, le géographe Yann Braem note combien ce pont fait l'objet d'une théâtralisation de la dispute territoriale au coeur de la ville de Mitrovica (voir la chronologie des violences qu'il propose dans son article "Mitrovica/Mitrovicë : Géopolitique urbaine et présence militaire", Balkanologie, n°1, vol. VIII, juin 2004, pp. 73-104). Si ce pont est désormais ouvert à la circulation (circulation piétonne libre, et automobile autorisée après un contrôle d'identité par un check-point sur la rive sud, aux mains des autorités locales), force est de constater que les échanges ne sont pas du tout ceux que devraient inciter un pont avec une telle situation centrale dans la ville.

* Voir, à ce propos, le mémoire de maîtrise sur la géographie militaire à Mitrovica (en ligne), notamment les passages sur la cartographie militaire.



Les ponts de l'Est : des ponts-infrastructures

A l'Est de ce pont-symbole, existe deux autres ponts : en se baladant vers l'Est, on tombe d'abord sur un autre pont pour automobiles et piétons (le pont "Cambronne" sur les cartes militaires, ici à droite), et à l'extrême-Est, on tombe sur un pont ferroviaire (ici, à gauche). Ces deux ponts ont la même fonction dans la ville : ce sont des infrastructures auxquelles aucune symbolique n'a été attribuée. Les déplacements sur le pont Cambronne sont libres, les piétons et les automobiles peuvent actuellement le traverser sans aucun contrôle, et le pont n'a jamais fait l'objet d'un dispositif sécuritaire aussi important que le pont ouest (même dans les périodes d'immédiat après-guerre marquées par une très forte tension, la sécurisation de ce pont restait moins importante). Pourtant, ce pont-infrastructure ne permet pas aux échanges de se densifier, bien qu'il permette à chacun de contourner le pont central (point de tension dans la ville de Mitrovica).


Le pont Est de Mitrovica




Les ponts-passerelles : mobilités et contournements

La passerelle la plus connue (passerelle piétonne dite "Tancarville" sur les cartes de la KFOR) est une infrastructure construite par les militaires français (voir des photographies de la construction de la passerelle sur le site Novo Selo) afin de permettre aux Albanais vivant dans les Trois Tours de rejoindre, à pied, le Sud de la ville, principalement pour aller travailler et commercer. Les Trois Tours sont trois immeubles identiques qui formaient avant le déclenchement de la guerre un des rares lieux réellement multiculturel de Mitrovica, et même du Kosovo : à l'intérieur des tours, Serbes, Albanais, et petites minorités se côtoyaient. Mais avec la guerre, ces trois bâtiments se sont fortement homogénéisés, les Albanais et les petites minorités se regroupant dans deux tours, tandis que les Serbes s'installaient dans la dernière tour ou s'éloignaient de ce micro-quartier (voir le schéma illustrant les processus d'homogénéisation extrême des espaces de vie pendant la guerre du Kosovo). Les Trois Tours se trouvent à proximité du pont ouest (voir le schéma du centre de Mitrovica), pourtant il est dangereux pour les Albanais des Trois Tours de se rendre sur la rive sud par ce pont, puisqu'ils doivent transiter par les zones d'habitation serbe, et surtout passer à proximité des" Gardiens du pont", "des Serbes radicaux, recrutés comme supplétifs de la Kfor en 2000, mais qui se sont investis ensuite d'une compétence occulte de contrôle du Nord de la ville, en commençant par l'accès au pont [...], l'un des avatars des "structures parallèles" qui administrent le Nord et dont la communauté internationale voudrait bien se débarasser, sans encore oser en prendre les moyens" (lire Jacques Aben, "Une géographie politique de Mitrovitsa", Défense nationale, n°2/2003, février 2003, pp. 99-109). Depuis sa contruction, la structure de la passerelle a été renforcée, marquant la nécessité de sa nécessité de maintenir ce lieu d'échange pour décloisonner les Albanais des Trois Tours, ce qui témoigne de l'échec de la reconstruction du pont ouest, non en tant qu'infrastructure, mais en tant que géosymbole de la réconciliation. Aujourd'hui, la passerelle est devenue un point de passage privilégié pour les Roms de Mitrovica, entre leurs deux espaces de vie : "Ostérode" (ancienne base de l'Armée yougoslave, qui a été reprise par la KFOR au moment du déploiement de la force internationale, et sert, depuis le début du processus de désengagement des troupes à l'intérieur de la ville de Mitrovica, de camp de déplacés aux Roms) et Roma Mahala (le quartier rom, en partie reconstruit par la communauté internationale depuis 2008).


Plus à l'Ouest encore, on trouve un pont-passerelle qui permet de traverser la rivière Ibar. Les voitures ne peuvent circuler que dans un sens et ne peuvent pas se croiser sur ce pont-passerelle qui relie l'extrême-Ouest de la rive Sud (où l'on trouve notamment le grand stade de Mitrovica, toujours à l'abandon bien que des projets de réhabilitation aient été envisagés) et Suvi Do, une zone périurbaine située à l'extrême Ouest de la rive Nord de l'Ibar, traditionnellement peuplée d'Albanais. Bien que ce pont-passerelle ait une capacité très limitée (les voitures ne peuvent passer que dans un sens, à un rythme très ralenti, et même les piétons peuvent les gêner), il suffit largement aux besoins : on ne trouve pas de "bouchons" à cet endroit, le gué étant surtout utilisé par les Albanais de Suvi Do (peu nombreux) pour rejoindre le Sud de la ville .


Au final, le gigantisme du pont ouest, au centre de la ville de Mitrovica, ne permet pas d'imposer aux habitants cette infrastructure : les détours et les contournements (à l'Est comme à l'Ouest) restent des pratiques spatiales bien ancrées (même dans le cas où de telles trajectoires imposent aux habitants de parcourir une plus grande distance), et "LE" pont reste au coeur des attentions.



Les billets à lire sur la question des ponts à Mitrovica :

Les autres ponts dans les villes en guerre :


lundi 20 septembre 2010

Le centre de Mitrovica


Plusieurs questions m'ont été posées concernant le schéma du centre de Mitrovica publié dans le billet sur les "Affrontements à Mitrovica : de l'événement sportif aux tensions intercommunautaires" (14 septembre 2010).

Ce schéma avait pour but de montrer la proximité du gymnase et du pont ouest, non de montrer la totalité de la ville de Mitrovica (qui a déjà été développée dans d'autres billets, voir notamment les cartes proposées dans le billet "Kosovo : vers de nouvelles fragmentations territoriales ?", et le power-point "Les espaces de la mort à Mitrovica" qui propose des cartes de l'évolution de la répartition des populations, notamment de la réappropriation d'un quartier à l'extrême-Nord de Mitrovica par les Albanais, à proximité des cimetières musulmans).

Ce schéma ne donne pas à voir tous les espaces de Mitrovica, mais uniquement les alentours du pont ouest (souvent appelé "le" pont de Mitrovica, du fait de sa très forte symbolique). De part et d'autre de ce pont, se font face les centres-villes albanais au Sud, et serbe au Nord (ce qui ne signifie pas qu'il n'y a pas des poches de peuplement albanais au Nord de l'Ibar, mais ils ne sont pas à proximité immédiate du pont ouest). Voici donc les délimitations du schéma utilisé dans le billet sur les récents affrontements entre Serbes et Albanais à la suite d'un événement sportif, qui avait amené une réflexion sur l'utilisation des lieux sportifs dans la mise en scène des violences intercommunautaires au sein de la ville de Mitrovica.



Localisation du schéma

dimanche 19 septembre 2010

Le regard d'un géographe sur la mondialisation


Le géographe Jacques Lévy était l'invité de l'émission "Les matins" de France culture du 20 mai 2010. Voici la vidéo de l'enregistrement de cette émission qui questionnait l'apport de l'approche spatiale dans la compréhension des processus de mondialisation.

 

Présentation de l'émission :
Dans les salles du musée des Beaux Arts de Rouen, on peut découvrir un beau portrait signé du maître espagnol Diego Vélasquez... Cette toile représente un homme jovial, qui tend l'index de la main gauche vers une mappemonde. Elle est intitulée "Démocrite, ou Le Géographe"... Le géographe qui entend saisir et comprendre notre monde dans toutes ses dimensions... Nous recevons aujourd'hui une grande figure de la géographie contemporaine, Jacques Lévy, géographe, professeur à l’école polytechnique fédérale de Lausanne et professeur à Sciences-Po Paris. Jacques Lévy qui s'est notamment fait connaître pour ses travaux sur la mondialisation. Qu'est-ce que la géographie, discipline souvent mal-aimée, peut nous dire de notre monde de 2010... Vivons-nous la fin de la mondialisation heureuse ? Y a t-il jamais eu une mondialisation heureuse ? La crise marque t-elle l'apparition de nouvelles fractures sur le globe ? Ce matin, nous allons faire comme le géographe de Vélasquez, nous allons regarder le monde de haut...

Source de l'information :
Le site de l'émission "Les matins"

FIG 2010 : Forêt et Russie


Le programme du prochain Festival international de géographie, consacré à la forêt, avec pour pays invité la Russie, qui se déroulera du 7 au 10 octobre 2010, dans la capitale de la géographie Saint-Dié-des-Vosges, vient de paraître (à consulter sur le site de la ville de St-Dié). Les thématiques abordées seront très nombreuses (gestion de la forêt, aménagement du territoire, développement durable, démographie, géopolitique, géostratégie, risques, changement climatique, cartographie, gastronomie...).


Pour ceux qui ne pourraient se rendre au FIG, trois émissions de France Culture seront enregistrées sur place et permettront de suivre une partie des débats qui s'y dérouleront :

- "Les matins de France Culture" par Marc Voinchet, vendredi 8 octobre, 7h-9h (émission en direct et en public).

- "La fabrique de l'Histoire" par Emmanuel Laurentin, vendredi 8 octobre, 9h-10h (émission en direct et en public).

- "Planète Terre" par Sylvain Kahn, vendredi 8 octobre, 10h30-11h00 (enregistrement de l'émission diffusée le mercredi 13 octobre, 14h-14h30).





samedi 18 septembre 2010

Colloque "Villes et territoires réversibles"


Les colloques de Cerisy proposent toujours des regards particulièrement innovants sur la recherche en lettres, et en sciences humaines et sociales : on pense notamment à la conférence sur "Logiques de l'espace, Esprit des lieux" en 2000 (dont les actes ont été publiés en 2000 aux Editions Belin, et constituent un ouvrage de référence pour comprendre le "tournant culturel" de la géographie), sur "Guerres et totalitarismes dans la bande dessinée" en 2006, ou sur la "Normandie sensible : regards croisés de géographes et de plasticiens" en 2009 (voir le programme). Le prochain colloque intéressera tous ceux qui se questionnent sur la ville : organisé par Franck Scherrer et Martin Vannier, le colloque "Villes et territoires réversibles" réunira des chercheurs de toutes disciplines touchant aux études urbaines (géographes, urbanistes, architectes, philosophes de l'urbain, sociologues, économistes...) et des responsables artistiques et politiques qui font face chaque jour aux aménagements urbains, du lundi 20 septembre au lundi 27 septembre 2010 au Centre Culturel International de Cerisy-la-Salle (Manche). Voir le programme et les résumés des interventions.


Présentation par les organisateurs :
Un des fondements de la pensée moderne quant à l’action collective fut, comme condition historique du progrès, de produire de l’irréversibilité. La ville du XXe siècle, sa société, ses mondes d’action collective, ont été profondément structurés, mais aussi profondément marqués, par ce goût démiurgique pour l’irréversible. On sait aujourd’hui ce qu’a permis de produire cette posture immodeste, mais aussi ce qu'il en a coûté, et continue d’en coûter.

On fait l’hypothèse que le nouveau fondement de la pensée post-moderne — ou hyper-moderne si l’on préfère échapper à ce débat — de l’action collective est dans la promotion du principe inverse : la réversibilité, comme nouvelle posture de la relation à un futur désormais largement désigné comme incertain. L’injonction au développement durable elle-même porte en germe une nouvelle utopie de la ville et du territoire réversible : comment agir de façon équitable sans avoir pour horizon la ville sans cesse inachevée afin de pas obérer les capacités des générations futures à conduire leur propre développement ?

La ville réversible au sein de territoires et de réseaux qui le seraient tout autant, les uns comme les autres par leurs acteurs, leurs systèmes d’action, leurs mondes techniques, leurs univers de production matérielle et idéelle ? De quoi peut-il bien s’agir ? D'où une seconde hypothèse : la réversibilité qualifie, dans les sociétés développées, la relation que l'on construit avec le futur de la même manière que le patrimoine est devenu le filtre hégémonique de notre relation avec le passé.

Ce colloque résolument interdisciplinaire se donne pour objectif de répondre à ces questions en explorant la réversibilité dans le nouveau système de valeurs, dans les formes concrètes, techniques, organisationnelles de son avènement, dans les cultures professionnelles qui la fondent progressivement comme une nouvelle modalité structurante de nos rapports à un temps moins linéaire, et à un espace plus modulable.

Prioritairement destiné aux urbanistes et aux aménageurs, mais ouvert également à tous ceux, chercheurs, enseignants, étudiants, responsables de collectivités, que ces enjeux retiennent, ce colloque souhaite organiser une large rencontre sur la question de la réversibilité, telle qu’elle a déjà été abordée dans d’autres mondes, techniques ou culturels, que celui de la ville (en particulier celui de la production industrielle et du management de l’entreprise), et telle qu’elle a déjà cheminé, aussi bien dans les problématiques scientifiques (notamment les sciences de la matière et les sciences de l’univers) que dans la création artistique (notamment dans le Land Art ou les arts de la rue). 

"Pour une anthropologie de la mobilité" (Marc Augé)


Marc Augé, 2009, Pour une anthropologie de la mobilité, Payot & Rivages, Paris, 94 p.

Les géographes connaissent bien Marc Augé , notamment pour Le Temps en ruines (Galilée, 2003) ou pour les débats animés qui ont suivi la parution de Non-lieux. Introduction à une anthropologie de la surmodernité (Le Seuil, 1992). On le retrouve dans un nouvel essai où il complète sa conception de la surmodernité au prisme de la question des mobilités. Il s’attaque donc à un champ de recherche particulièrement fécond depuis une dizaine d’années. Dans cet ouvrage, qui se présente comme un court essai de réflexions, l’anthropologue Marc Augé nous entraîne au cœur des grandes problématiques actuelles des sciences humaines et sociales : annonçant une présentation des quelques notions-clés qu’il nous faut aujourd’hui penser pour appréhender le « monde “surmoderne” » qui, loin d’être un monde achevé, est sans cesse affecté par des mobilités matérielles, humaines, idéologiques et virtuelles, l’auteur propose ces mobilités comme grille de lecture de l’opposition entre globalisation et « “abcès de fixation” territoriaux ou idéologiques » (p. 8). La problématique semble, de prime abord, simple : comment analyser et comprendre le « paradoxe d’un monde où l’on peut théoriquement tout faire sans bouger et où l’on bouge pourtant » (p. 8) ?




vendredi 17 septembre 2010

La rentrée des blogs : géographie urbaine et Afghanistan


Quelques blogs à signaler pour cette rentrée, tout particulièrement pour ceux qui s'intéresseraient à la géographie urbaine et/ou à l'Afghanistan.


La France en Afghanistan
Le blog La France en Afghanistan propose de courts billets sur l'actualité de la Kapisa où est basée une partie des troupes françaises. Tenu par la mère d'un jeune soldat du 13e BCA, le blog a été lancé au moment du déploiement de ce régiment dans le Nord-Est de l'Afghanistan, mais continue d'être alimenté régulièrement. En plus d'une veille attentive, le blog relaie des témoignages de militaires, et compile les informations relatives à la région stratégique qu'est la Kapisa, tout comme à l'ensemble de l'Afghanistan. Pour retrouver le contexte du déploiement des troupes françaises en Kapisa, voir le billet de Jean-Dominique Merchet : "Kâpissâ, futur lieu de déploiement des renforts en Afghanistan" sur le blog Secret Défense.


La coalition en Afghanistan
Dans le même esprit, le blog La coalition en Afghanistan est animé par Isabelle Bal : on avait présenté les différents blogs que cette chef de la cellule Aide aux Familles du 18ème Régiment des Transmissions, anime. Certains ne sont plus en accès libre, et le blog sur l'Afghanistan a été remplacé par celui-ci (et reprend ses archives). Il est toujous possible de consulter le blog sur L'ex-Yougoslavie (actuellement en pause), La FINUL au Liban et sur Le Tchad.  Dans La coalition en Afghanistan, on retrouve des billets sur la présence française, mais aussi sur l'histoire et la géographie de l'Afghanistan, ainsi que des billets détaillés sur les territoires du militaire (par exemple, l'opération Normandy Eagle d'août 2010), sur les territoires des civils (par exemple, Kaboul), et sur les hauts-lieux (par exemple, la cité des bouddhas afghans) dans ce pays en guerre.


La couverture végétale de la Kapisa
Source : Afghanistan Information Management Services (AIMS).



Urbain, trop urbain
Le superbe blog Urbain, trop urbain présente de très nombreux billets sur les villes de par le monde (Shanghaï, Hong Kong, New York, Paris...). Animé par Claire Dutrait et Matthieu Duperrex, il acceuille des textes de contributeurs extérieurs. Quatre rubriques permettent de découvrir les différentes problématiques et les différentes échelles des études urbaines : "Signal urbain" (icônes, ratures, marqueurs de la ville), "Lecture urbaine" (scène, dispositif, tracé et sens de la ville), "Ecriture urbaine" (trajet du récit, espace de langage de la ville) et "Post-it urbain" (petits papiers, tags, flyers, relais de la ville). On apprécie tout particulièrement l'attention portée à la dimension symbolique des lieux et des territoires dans les villes, à la portée discursive des aménagements urbain...


Urbanité/Viabilité
Voici un blog qui propose une veille très attentive à la question de la ville viable. Les ressources ainsi mises au service des utilisateurs du blog regroupent des documents très différents : annonces de colloques, parutions d'ouvrages, mais aussi (et c'est là l'originalité de ce blog, et aussi toute son utilité !) des articles de journaux, des billets de blogs, des annonces d'émissions de radio/télé, et des sources en ligne qu'il n'est pas toujours facile de repérer par une recherche sur un moteur de recherches. Le blog Urbanité/Viabilité a réellement vocation à devenir un moteur de recherches en études urbaines, parfaitement complémentaire à Crévilles.org, qui lui a vocation à présenter des ressources plus universitaires. Une excellente initiative, qui facilite grandement le travail de recherche ! Plus de détail sur la genèse de ce projet sur le blog du géographe Eric Verdeil : Rumor.



Coupe d'une ville nord-américaine



mercredi 15 septembre 2010

Le Dessous des cartes : "Les cartes de la guerre et de la paix"



"Les cartes de la guerre et de la paix"
Le Dessous des cartes, 11 septembre 2010.


Comment cartographier la guerre et la paix à l'échelle mondiale ? Cette émission du Dessous des cartes sur "Les cartes de la guerre et de la paix" montre avec pertinence la pluralité des définitions de la conflictualité, de la guerre et de la paix amène des représentations cartographiques très variées. La carte de la guerre et de la paix ne traduit pas la réalité, mais une perception de la réalité (on retrouvera à ce propos le billet sur la carte-discours). Cette émission est à (re)découvrir pour comprendre combien, si elles paraissent a priori évidentes, les définitions de la guerre et de la paix sont de réels défis intellectuels. Sur le site du Dessous des cartes, on découvrira un dossier composé des cartes commentées de l'émission. A (re)découvrir également, le texte du géographe Paul Claval, lors de son intervention lors du Festival international de Géographie (FIG 2008) sur "Les outils géographiques pour penser la guerre, penser la paix".



De la définition de la guerre à sa représentation cartographique

Exposition "Berlin : lieux, traces, frontières"


L'exposition photographique "Berlin. Lieux, traces, frontières. La photographie à l'épreuve des transformations sociales" présentera le travail de Tristan Siegmann sur la rénovation d'un quartier berlinois. Des photographies qui interrogent la reconstruction, non seulement dans la rénovation morphologique de la ville, mais aussi dans les rivalités entre les acteurs de cette politique urbaine, et dans l'identité de la ville à travers le processus de patrimonialisation. L'exposition se déroulera à Nantes (Espace Cosmopolis) du 13 au 24 octobre 2010. Voir les détails sur le site du CIERA (Centre interdisciplinaire d'études et de recherches sur l'Allemagne).

Actualisation du billet : suite à une demande des organisateurs, le communiqué de presse a été ajouté à la fin de ce billet.




Présentation sur le site du CIERA :
Durant le mois d’octobre, le photographe Tristan Siegmann sera en résidence de recherche et de production photographiques à l’Institut d’Etudes Avancées de Nantes (IEA). Une approche pédagogique de sa démarche est envisagée dans le cadre du projet Cosmopolis soutenu par la ville de Nantes. Les photographies du quartier Friedrichshain à Berlin, exposées du 13 au 24 octobre dans le lieu dit, offrent en effet des similitudes avec les évolutions du quartier de Malakoff, coeur de la rénovation urbaine de la capitale de Loire-Atlantique.

Evoluer dans un paysage urbain habituel est chose moins aisée qu’on ne le croit. Le voir et le comprendre, c’est accepter de le remettre en cause dans son évidence. La représentation des transformations urbaines est naturellement toujours corrélée à celle des changements sociaux qui la sous tendent. Leur redéfinition permanente permet-elle de réduire l’espace qui existe entre la dualité de la réalité du territoire urbain et la recomposition d’une ville imaginaire ou à ré-imaginer au sens le plus noble du terme ?



Communiqué de presse :
L’exposition photographique de Tristan Siegmann sur le thème de « Berlin : lieux, traces, frontières- La photographie à l’épreuve des transformations sociales » aura lieu du 13 au 24 octobre 2010 à l’Espace Cosmopolis de Nantes.

Autour de cet événement iconographique se tiendra une série de débats et conférences sur les différentes problématiques que suscitent les images ainsi présentées à propos du dépassement du mur, de la réinvention de la ville à partir de la matrice berlinoise ou de l’entrée de la capitale dans le champ des rapports franco-allemands. Le programme, qui a mobilisé l’énergie de nombreux partenaires (ville de Nantes, Nantes Métropole, Conseil Régional des pays de Loire, Conseil général de Loire-Atlantique, Maison de l’Europe à Nantes, CIERA, Centre culturel franco-allemand de Nantes, Rectorat de Nantes, Institut des Etudes Avancées de Nantes), a été établi sous la direction de Jean-Louis Georget (CRIA, EHESS/CNRS) en partenariat avec la revue Allemagne d’Aujourd’hui.




Soutenance d'HDR : "Villes et frontières : un jeu de construction de territoires"


Le géographe Bernard Reitel, spécialiste de la question des frontières (il participe au Groupe Frontière de l'Université de Strasbourg, et a dirigé de nombreuses publications sur les liens entre villes et frontières, notamment Villes et frontières, co-dirigé avec Patricia Zander, Jean-Luc Piermay et Jean-Pierre Renard, 2002, Economica) soutiendra son habilitation à diriger les recherches (HDR) le jeudi 16 septembre 2010 à 14h30 à l'Université Paris Ouest (Nanterre, bâtiment B, salle B015). Ce travail questionne les conséquences entre la proximité d'une frontière étatique dans l'agencement de la ville et l'habiter.



Présentation des axes de recherche

◊ Comprendre la production de l’espace urbain par les pouvoirs politiques dans un environnement de "frontière"


– La frontière :
* Un révélateur des différences
* Un objet de contact

– Les espaces urbains :
*Un processus d’agglomération et d’étalement urbain
*Une complexification croissante de la gestion territoriale


◊ Une question d’ordre générale : le degré d’intégration des agglomérations urbaines


◊ Quatre pistes :
– Le rôle de la frontière dans la construction spatio-temporelle des agglomérations (analyse de la croissance urbaine et des rythmes d’ouverture et de fermeture de la frontière);
– Les logiques de production de l’espace urbain : la planification urbaine (analyse des projets urbains)
– Les modes de gouvernance de l’agglomération (analyse du jeu des pouvoirs publics)

◊ Trois "métropoles" européennes : Strasbourg, Bâle, Berlin




Sources de l'information :



mardi 14 septembre 2010

Affrontements à Mitrovica : de l'événement sportif aux tensions intercommunautaires


Dans son blog sur les émeutes dans le monde, l'anthropologue Alain Bertho nous apprend de récents affrontements intercommunautaires entre Serbes et Albanais de Mitrovica, la ville-symbole du Kosovo. "Les affrontements ont suivi la défaite de la Serbie face à la Turquie en demi-finale du championnat du monde de basketball, selon la police" (Alain Bertho, "Basket : affrontement à Mitrovica", Anthropologie du présent, 12 septembre 2010). Ce type d'utilisation politique d'événements sportifs se multiplie dans les Balkans (voir les billets "Sport, violence, politique et processus de paix dans les Balkans", "Les hooligans dans les Balkans : les lieux des revendications politico-identitaires", et le power-point "Violences, sport et processus de réconciliation au Kosovo : Analyse des actions humaintaires dans la ville de Mitrovica"). Ces violences se sont déclenchées entre hooligans supportant des équipes emblématiques pour chacune des deux communautés majoritaires dans la ville : l'équipe de Serbie pour les Serbes du Nord de la ville, et l'équipe de Turquie (pays musulman, qui a toujours apporté son soutien aux Albanais du Kosovo) pour les habitants du Sud de la ville. Les affrontements ont eu lieu, comme dans toute période de violences intercommunautaires dans cette ville, sur le pont de Mitrovica, ancien mis en scène comme le symbole de l'impossible réconciliation entre les deux communautés (voir l'article "Des ponts entre les hommes. Les paradoxes de géosymboles dans les villes en guerre").


Autre aspect qui doit être pris en compte dans la sécurisation et la pacification de la ville de Mitrovica : les lieux où se déroulent les événements sportifs locaux. La géographie du lieu prend ici toute son importance : le gymnase où se déroule généralement les matchs de basket à Mitrovica se trouve en effet à proximité du pont central, géosymbole de toutes les tensions au Kosovo. Ce gymnase, longtemps occupé par les militaires français, tout comme le centre culturel, afin de créer une zone de confiance autour du pont de Mitrovica, a été rendu aux institutions locales et aux habitants de Mitrovica, et a ainsi pu retrouver sa fonction de lieu d'accueil d'événements sportifs. Pourtant, la proximité du pont n'est pas sans conséquence, surtout lors de rencontres sportives opposant des équipes locales qui représenteraient les deux communautés. Pour l'heure, le gymnase, situé sur la rive Sud de la rivière Ibar, séparant dans la ville de Mitrovica les deux quartiers serbe au Nord et albanais au Sud, accueille principalement des rencontres d'équipes etnhiquement homogènes, et surtout non adversaires sur le point de vue identitaire. C'est bien l'une des limites au processus de stabilisation du Kosovo, et l'un des paradoxes des processus de sortie de crise auxquels sont confrontées les armées engagées dans des missions de maintien ou d'imposition de la paix : sécuriser revient à séparer les adversaires, tandis que réconcilier demande de faire se côtoyer les différentes communautés. Plus de 11 ans après la fin de la guerre du Kosovo, la ville de Mitrovica, même dans ses événements sportifs et festifs, reste une ville divisée.


Le gymnase, à proximité du pont de Mitrovica
Source : Bénédicte Tratnjek, mémoire de maîtrise, 2004.

lundi 13 septembre 2010

Nouvelle résolution des Nations Unies pour le Kosovo


On en parlait il y a quelques jours : le Kosovo est actuellement au coeur de nombreux enjeux locaux (avec la proposition d'autonomie pour le Nord du Kosovo faite par le gouvernemant de Pristina) et internationaux (avec la question de la légitimité et de la durabilité de la résolution 1244 mise en place à la fin de la guerre du Kosovo en juin 1999). Voir le billet "Kosovo : vers de nouvelles fragmentations territoriales ?" qui présentait rapidement quelques-uns de ces enjeux.

Depuis, "l'Assemblée générale des Nations Unies a adopté à l’unanimité le projet de résolution sur le Kosovo présenté par la Serbie et soutenu par l’UE" ("ONU : adoption à l’unanimité de la résolution sur le Kosovo", Le Courrier des Balkans, 10 septembre 2010). Si certains médias parlent d'un début de déblocage, constatant que des acteurs opposés sur la question de la reconnaissance de l'indépendance du Kosovo (notamment au sein de l'Union européenne) sont tombés d'accord pour adopter cette nouvelle résolution, la situation reste très complexe sur le terrain.

Cette résolution du 8 septembre 2010 (voir également le compte-rendu de cette session, avec les différentes positions adoptées par les pays présents) concerne les procédures précédemment entammées par la Serbie concernant la légitimité de l'auto-proclamation de l'indépendance du Kosovo par la majorité albanaise. La Cour internationale de justice (CIJ) avait en effet été saisie par la Serbie pour un avis consultatif sur la question du statut du Kosovo. La CIJ a décidé que "la déclaration d’indépendance du Kosovo ne viole pas le droit international" le 22 juillet 2010. Il ne s'agissait là que d'un avis consultatif, sans rôle décisionnel. La résolution prise par l'Assemblée générale des Nations Unies entérine cet avis consultatif, et fait de l'Union européenne un acteur privilégié des négociations à venir entre la Serbie (qui a rappelé sa décision de ne pas reconnaître l'indépendance du Kosovo) et le Kosovo. Elle confirme à la fois le rôle de l'UE dans les Balkans, et le fait que le processus de stabilisation de cette région passe par l'intégration future des Etats issus de la décomposition de la Yougoslavie dans l'UE.

Néanmoins, les violences se poursuivent, et les affrontements intercommunautaires ne sont pas les seuls blocages dans la (ré)conciliation des populations. En effet, les tensions intracommunautaires, opposant modérés et radicaux à l'intérieur des différentes communautés, mais aussi Albanais musulmans et Albanais catholiques, deviennent de plus en plus prégnantes (voir l'article "Kosovo : la « tolérance religieuse albanaise », un mythe qui a vécu ?", Le Courrier des Balkans, 21 juin 2010).


A lire : le dossier "Kosovo : accord entre la Serbie et l’Union européenne devant les Nations Unies" sur le site du Courrier des Balkans.



vendredi 10 septembre 2010

Jeux Google Earth : "Tintin, témoin du XXème siècle"


Alors que Tintin s'invite au pays des philosophes dans un passionnant hors-série de Philosophie magazine (HS n°8, septembre 2010), dans lequel on remarquera tout particulièrement la partie consacrée à la politique ("L'Empire du Milieu", "Tintin et les Picaros", "Une leçon de communication", "Les affreux", "Comment faire échouer un anschluss", "Clichés d'Afrique"), les historiens et les géographes se sont depuis longtemps intéressés au monde de Tintin et de ses acolytes. Deux pages Internet sont à signaler pour qui voudrait découvrir une approche spatiale du monde imaginaire créé par Hergé :
Pour prolonger l'exploration des liens entre géographie et bande dessinée, on pourra également découvrir un passionnant article sur les cartes telles qu'elles sont (re)présentées dans la BD : "Voyage dans la bande dessinée à travers quelques cartes" (Olivier Marlet, Mappemonde, rubrique L'image du mois, n°87, n°3/2007).

Concernant plus spécifiquement le cas de Tintin, dont les voyages entraînent le lecteur dans un monde imaginaire fondé sur la perception d'Hergé sur le monde réel sur lequel il portait un regard très engagé politiquement (en témoignent les nombreux débats autour de Tintin au Congo, mais on pourrait également pensé à son rejet du Japon, que l'on voit apparaître dans Le Lotus bleu, qui était caractéristique de la vision qu'avait le monde occidentale de ce pays dans les années 1930), on (re)découvrira le jeu pédagogique créé par Jean-Marc Kiener (professeur d'histoire-géographie au lycée d'Annecy) à partir de Google Earth : disponible sur son très beau site Voyages virtuels (qui propose d'autres jeux de ce type et de nombreuses ressources pédagogiques sur l'utilisation de Google Earth pour enseigner ou comprendre la géographie), "Tintin, témoin du XXème siècle" permet ainsi d'explorer l'histoire et la géographie telle qu'elle est (re)présentée dans cette célèbre bande dessinée, tout en se divertissant(voir la rubrique "Jeux Google Earth"). Une utilisation qui est pensée pour une utilisation dans le secondaire, mais un exemple d'enseignement qui dépasse ce cadre restreint. Bon jeu !





mercredi 8 septembre 2010

Kosovo : vers de nouvelles fragmentations territoriales ?


Le processus de reconnaissance de l'indépendance du Kosovo stagne : aux lendemains de l'auto-proclamation par les Albanais du Kosovo le 17 février 2008, environ 1/3 des Etats membres des Nations Unies a reconnu cette indépendance, environ 1/3 ne s'est pas prononcé, environ 1/3 s'y est opposé. Depuis quelques Etats ont depuis reconnu l'indépendance du Kosovo, cet équilibre a été quelque peu altéré, mais les opposants à l'indépendance restent sur leur position, bloquant ainsi le processus de reconnaissance, légale pour les uns, illégale pour les autres. Les deux pouvoirs qui se disputent encore aujourd'hui ce territoire - celui de Serbie et celui du Kosovo - sont ainsi légitimes, selon le point de vue envisagé* (voir les billets "L'indépendance du Kosovo : positions serbes, macédoniennes et monténégrines", "Le Kosovo vu par..." et "Kosovars ou Kosoviens ? Nommer les lieux, nommer les peuples").

* On utilise d'ailleurs les guillemets pour parler de l' "Etat" du Kosovo pour souligner cette situation juridique complexe, et la diversité des réactions quant à la reconnaissance du Kosovo : pour exemple, si les médias français parlent unanimement de l'Etat du Kosovo, suivant par-là la reconnaissance de cette indépendance par l'Etat français dès son auto-proclamation, ce n'est absolument pas le cas des médias des pays qui se sont officiellement opposé à cette reconnaissance (parmi lesquels la Russie, la Chine, le Venezuela, l'Espagne... et bien évidemment la Serbie), qui de fait parlent du Kosovo non comme un Etat, mais comme une province du Kosovo. Ces guillemets ne sont pas un parti pris, mais relève d'une précaution à prendre tous les points de vue des acteurs politiques impliqués.


Pourtant, l'actualité du Kosovo est assez mouvementée : un attentat à Mitrovica le 2 juillet 2010, la question de la présence de la Minuk et de la résolution 1244, et la question d'une nouvelle partition territoriale avec l'autonomie proposée par le gouvernement de Pristina au Nord du Kosovo. Ces trois éléments sont particulièrement révélateurs des enjeux d'un "Etat" qui peine à se trouver, à fonctionner, à prendre une place dans la région balkanique, et à définir une identité et une politique nationales.



Mitrovica, une ville-symbole
au coeur des enjeux du Kosovo

La ville de Mitrovica demeure un géosymbole pour l'ensemble du Kosovo et de ses habitants. Objet d'une réelle dispute territoriale (voir la définition donnée par Stéphane Rosière sur Hypergéo) entre Albanais très majoritaires au Sud de la rivière Ibar, et Serbes majoritaires au Nord de la rivière (voir les billets concernant la ville de Mitrovica sur ce blog, ainsi que le site "Géographie militaire à Mitrovica"), la ville de Mitrovica "détrône" Pristina en tant que ville-symbole, tant tous les regards sont tournés vers elle. Si Pristina est la plus grande ville du Kosovo et sa capitale, sa relative homogénéisation communautaire est ancienne (les Serbes et les "petits peuples" ne représentaient que des minorités dans cette ville avant la guerre : les Albanais représentaient environ 79 % de la population de Pristina en 1991*, et les Serbes environ 13 %). Les Serbes ont, en très grande partie, fui cette ville, pour les enclaves serbes proches, pour rejoindre l'aire de peuplement serbe du Nord-Kosovo, ou pour quitter le Kosovo. Si le gouvernement siège à Pristina, l'attention est tournée vers Mitrovica, véritable symbole géopolitique, comme le démontre le dernier exemple de violences : l'attentat du 2 juillet 2010 qui fit un mort et 11 blessés (dont un député serbe). Chaque vague de violences dans cette ville est l'occasion d'accusations des communautés les unes envers les autres. Cette explosion est particulièrement illustrative de ces rivalités de pouvoir et de ces rivalités de discours, destinés tant à l'intérieur du Kosovo (il s'agit de convaincre sa propre population et de stabiliser les relations avec "l'Autre") que vers l'extérieur du Kosovo (il s'agit également de convaincre les acteurs internationaux de la participation de sa communauté au processus de pacification, notamment pour bénéficier de l'aide humanitaire et financière, mais aussi pour avoir un poids aux tables de négociation concernant le statut du Kosovo, que les deux communautés continuent à se disputer) : "La police kosovare affirme avoir des preuves accusant les « extrémistes serbes » tandis que Belgrade pointe les « séparatistes albanais »" ("Kosovo : qui se cache derrière l’attentat de Mitrovica ?", Le Courrier des Balkans, 5 juillet 2010). A l'échelle de la ville de Mitrovica, on peut pas considérer l'auto-proclamation de l'indépendance du Kosovo comme une rupture politique, puisque Kosovska Mitrovica/Mitrovicë est plus que jamais une ville-symbole disputée (voir "Mitrovica, synthèse des problèmes du Kosovo").

* D'après des chiffres de l'OSCE. Les chiffres doivent être pris avec précaution, puisqu'il s'agit d'estimations. En effet, les Albanais ont boycotté - en signe de protestation pacifique à la politique de discrimination menée par Slobodan Milosevic - le recensement de 1991. Néanmoins, ils donnent des indications assez précises du paysage socioculturel du Kosovo d'avant-guerre.






De la ville fragmentée
à la fragmentation de l' "Etat" ?

La ville de Mitrovica est une ville fragmentée en deux espaces politiques, de part et d'autre de la rivière-frontière Ibar (voir la page "Mitrovica" sur le site Géographie de la ville en guerre, et sur le blog les billets sur Mitrovica, notamment le power-point "La construction identitaire au Kosovo : logiques territoriales et luttes de pouvoir dans la ville de Mitrovica"). On ne parle pas ici de ségrégations, mais de fragmentations urbaines, le fonctionnement de la ville étant divisé en deux, et les espaces de vie traduisant une partition de la ville en deux. De même, les revendications toponymiques (Kosovska Mitrovica au Nord / Mitrovicë au Sud) ou la diversité linguistique (la langue serbe écrite en alphabet cyrillique au Nord / la langue albanaise en alphabet latin au Sud) renforcent ce processus de fragmentation de la ville. La fragmentation de la ville de Mitrovica, géosymbole politique et culturel, fut longtemps au coeur des propositions de découpage des frontières entre le Kosovo et la Serbie. A ce titre, l'article "Controverses sur les frontières du Kosovo" du géographe Michel Roux (Balkanologie, vol. VII, n°2, décembre 2003, pp. 183-197), s'il peut paraître à première vue "dépassé" depuis l'indépendance du Kosovo, reste au coeur de l'actualité : la fragmentation de Mitrovica entraînera-t-elle la fragmentation étatique du Kosovo ?




Depuis l'été 2010, les médias balkaniques abordent la question de la partition du Kosovo ou de l'autonomisation du Nord du Kosovo non en tant que potentielle solution, mais comme un enjeu concret dans les discussions entre les deux principales communautés, serbe et albanaise. En effet, Dukagjin Gorani, conseiller du Premier ministre Thaçi, a déclaré fin juillet 2010 que le gouvernement de Pristina était prêt à proposer une forme d'autonomie territoriale pour le Nord du Kosovo, principalement peuplé de Serbes. Cette proposition n'est pas sans rappeler le statut du Kosovo dans l'ex-Yougoslavie : en 1974, par la nouvelle constitution yougoslave, Tito accorda le statut de provinces autonomes au Kosovo et à la Voïvodine. Ce statut leur donnait le droit à un gouvernement local, mais ne leur permettait pas d'accéder au droit à l'indépendance, contrairement aux 6 Républiques - Slovénie, Croatie, Bosnie-Herzégovine, Serbie, Monténégro et Macédoine - qui formaient la Yougoslavie. De plus, ce statut les soumettait à la République de Serbie dont le gouvernement pouvait décider, en levant l'état d'urgence (ce que fit Slobodan Milosevic), de suspendre l'autonomie. Avant l'auto-proclamation d'indépendance, les Albanais du Kosovo refusaient de revenir à ce type de statut, ayant conscience de la fragilité de l'autonomie. La solution proposée aux Serbes du Nord du Kosovo n'est pour l'instant qu'une proposition, mais elle traduit la poursuite du processus de "balkanisation", c'est-à-dire de morcellement des Etats, qui a commencé dans la région balkanique le 25 juin 1991, avec les proclamations d'indépendance de la Slovénie et de la Croatie (voir le billet "De la création au démembrement de la Yougoslavie").

Dans ce contexte, la résolution 1244 (qui a été instaurée à la suite de la guerre du Kosovo de 1999, et prévoyait de prendre fin avec le "statut final" pour le Kosovo) qui légitime la présence de l'UNMIK (force policière de la communauté internationale au Kosovo) et de la KFOR (force militaire) est remise en cause aujourd'hui (au moins pour la composante UNMIK) : les Etats reconnaissant le Kosovo comme un Etat indépendant doivent-ils rester au Kosovo sous l'égide de cette résolution ? La résolution 1244 prendra certainement fin dans les prochains mois, et devra laisser place à une autre forme d'intervention, dans la mesure où, pour l'heure, la présence de la communauté internationale, notamment la composante militaire, reste une nécessité pour assurer la protection des populations qui vivent en situation de minorités ("petits peuples" et "enclavés"). La stabilité du Kosovo reste très fragile, d'autant que les extrémistes des différentes communautés restent très attentifs à chaque décision, que les habitants se sentent pour certains en totale insécurité, et que l'économie du Kosovo peine à se développer.